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Et si les abeilles participaient à la lutte contre le cancer de la prostate ?

Publié le 26 février 2021 Mis à jour le 26 février 2021

Un texte de la Minute Recherche par Jean-Marc Lobaccaro et Silvère Baron (GReD, unité mixte de recherche Inserm / CNRS / Université Clermont Auvergne).

Le cancer de la prostate est une des tumeurs les plus fréquentes et les plus délétères chez l’homme. Des thérapies efficaces ont été ainsi mises en place depuis de nombreuses années, notamment visant à bloquer l’action des androgènes qui sont les hormones mâles synthétisées par les testicules et qui favorisent la croissance des cellules tumorales de prostate. Ces molécules thérapeutiques que l’on appelle « anti-androgènes » sont utilisés pour bloquer le récepteur des androgènes dans les étapes métastasées du cancer. Ils agissent comme une fausse clef (anti-androgène) qui entrerait dans la serrure (récepteur des androgènes), et occuperaient la place de la vraie clef (androgène naturelle), mais sans ouvrir la porte, entraînant la mort des cellules cancéreuses.

Hélas, une résistance à ces anti-androgènes se met inexorablement en place après quelques mois, aboutissant à des formes agressives de la maladie. Une des explications reste la capacité du récepteur des androgènes à rester actif malgré la présence des anti-androgènes. Il devient donc indispensable de développer de nouvelles molécules capables d’empêcher cet échappement thérapeutique en diminuant la voie de signalisation régulée par le récepteur des androgènes. Les produits naturels sont une source intéressante pour découvrir de nouvelles molécules. A partir d’un criblage ethnobotanique, ce travail collaboratif Franco-Algérien vise précisément à évaluer les effets d’extrait alcoolique de propolis de Jijel sur les cellules humaines de cancer de la prostate.

La propolis est un mélange de résine végétale et de cire fabriqué par les abeilles à partir de ce qui est collecté dans la nature. Ce composé complexe est utilisé par les abeilles à la fois comme mortier, pour étanchéifier la ruche, mais également comme agent anti-infectieux. Dans les pays tempérés, la propolis est riche en composés phénoliques et donc en agent antioxydants. Nos travaux montrent pour la première fois que la propolis réduit significativement et avec une grande efficacité la survie des cellules de cancer de la prostate à la fois en augmentant la mort cellulaire et en bloquant le cycle cellulaire. De plus, la propolis agit comme un puissant anti-androgène et diminue la quantité de récepteurs des androgènes dans les cellules en induisant sa destruction.

Même si les composés actifs de la propolis restent à identifier, ce travail donne pour la première fois une assise scientifique à l’utilisation de la propolis dans le traitement de certaines formes résistantes de cancer de la prostate, et permettra à moyen terme le développement de nouveaux anti-androgènes appelés SARDs qui inhibent le récepteur des androgènes tout en favorisant sa dégradation. Ces composés prometteurs semblent plus efficaces, même dans les formes résistantes de tumeurs de la prostate. Une raison de plus de protéger les abeilles !